Published On: 8 janvier 2025Categories: Editoriaux de la lettre électronique

Quels vœux vous adresser ?  

Les usages incitent l’institut de recherches de la FSU à vous adresser ses meilleurs vœux pour l’année nouvelle. Nul doute que nous aspirons sincèrement à la santé et au bonheur de tous·toutes nos camarades mais il est permis que nous doutions de la valeur illocutoire de la formule tant nous sommes cernés d’incertitudes.

L’épreuve douloureuse qui vient de s’abattre sur Mayotte confirme que les promesses républicaines de respect, d’égalité et de justice sont loin d’être une réalité autant dans les discours que dans les actes. Il y a ce que l’urgence nécessite pour permettre aux Mahorais de retrouver des conditions de vie décentes et sûres et que le gouvernement lésine à leur donner. Mais il y a un avenir à plus long terme qui nécessite d’interroger la nature même de nos relations avec l’île et ses habitants. Nous avons laissé s’installer les conditions les plus indignes d’une pauvreté qu’aucune politique solidaire et égalitaire n’a voulu vaincre.

Mayotte est la forme la plus dramatiquement vive d’une question qui se pose sur l’ensemble du territoire national. Nous assistons depuis des années à un accroissement des écarts entre ceux qui parviennent à augmenter sans cesse des revenus déjà très élevés et ceux qui peinent de plus en plus à pouvoir bénéficier des conditions les plus élémentaires d’une vie digne. Pour elles et eux, l’appauvrissement réduit chaque jour davantage l’accès aux droits les plus élémentaires, ceux du soin, de la nourriture, du logement, de l’accès à la culture et aux loisirs.
Les postulats d’un libéralisme toujours plus extrême ont fini, insidieusement, par mettre en doute la légitimité des devoirs de l’État à produire une égalité que la logique du marché méprise profondément. Allons-nous laisser s’installer cette logique cynique qui voudrait que l’action publique ne soit plus perçue que dans les termes de la réduction budgétaire et, donc, que l’exigence redistributive et solidaire soit, purement et simplement, abandonnée par l’État ?
La responsabilité syndicale est grande de porter, haut et fort, une autre vision de l’action publique.

Voilà donc les vœux que nous voudrions vous adresser, chères et chers camarades.

  • Que le discours et l’action syndicales s’engagent toujours davantage dans la bataille des idées nécessaire pour préserver l’impératif de la justice sociale.
  • Que face au cynisme du profit capitaliste, nous n’ayons aucune pudeur, aucune réserve à affirmer l’égalité comme la vertu première de la démocratie. Et que nous en tirions toutes les conséquences pour lutter contre le patriarcat, le racisme et l’exploitation des travailleurs.
  • Que face aux stéréotypes qui ne cessent de dévaloriser le service public et ses agents, nous affichions notre fierté d’avoir choisi de servir l’intérêt général et que nous renforcions l’engagement de s’y tenir. Que nous en fassions l’outil de l’émancipation par la culture commune et la capacité d’un exercice éclairé des droits. Que nous fassions l’instrument de la préservation de la planète et de ses ressources.
  • Que face à la banalisation des idées les plus insupportables qui voudraient que le pragmatisme de l’économie puisse justifier le mépris d’une part d’entre nous au seul prétexte de l’appartenance sociale, raciale ou genrée, nous ne cédions à aucune concession qui viendrait restreindre le principe absolu de notre égalité en droits et le laisserait se suffire d’une déclaration de principe quand il exige les preuves d’une réalité effective.

Éditorial de la lettre de l’Institut de recherches de la FSU du 8 janvier 2025
Paul Devin, président de l’IR.FSU