Published On: 27 janvier 2025Categories: Editoriaux de la lettre électronique

Nous devons à nos enfants une vie exempte de violence et de peur

Les enquêtes ne manquent pas qui décrivent les violences subies par les enfants et les adolescent·es en France. Elles témoignent de leurs privations matérielles, alimentaires et culturelles et révèlent l’insuffisance de leur protection face aux violences physiques et psychologiques (1). Plus de 200 enfants sont victimes quotidiennement de violences et tout particulièrement les filles,  victimes de violences sexuelles. Chaque semaine un enfant meurt sous les coups de ses parents. Un enfant sur dix a été ou est victime d’inceste. Plus de 10000 mineur·es se prostituent et ce sont désormais plus de 2000 enfants qui dorment à la rue dont plusieurs centaines de moins de 3 ans(2).
Les alertes sont multiples et pour ne citer que les plus récentes : le Syndicat de la Magistrature en mai 2024 (3), le CESE en octobre 2024(4). Devant une commission parlementaire, la Défenseuse des Droits et le Défenseur des droits des enfants dénoncent(5) les manquements des politiques de protection de l’enfance. Même l’ONU exhorte la France à agir (6) et tout particulièrement, de façon urgente, contre les violences sexuelles subies par les enfants (7) ou à l’égard des enfants handicapés et des mineurs non-accompagnés.(8)

Les discours politiques ne cessent d’affirmer leur détermination, leur «volonté d’une lutte implacable»… mais la dureté des chiffres se renforce de leur croissance au fil des ans : non seulement les politiques mises en oeuvre ne parviennent pas à lutter contre cette insupportable réalité mais nous assistons à sa régulière progression.
L’insuffisance des moyens conduit à un épuisement des acteurs, au dysfonctionnement des services, à la non-exécution des décisions de justice, à une faiblesse du contrôle dont les effets se révèlent parfois dans leurs conséquences dramatiques, comme en a témoigné le procès de Châteauroux. La prise de conscience qui semble se dessiner est loin d’avoir mis à bas le déni politique qui refuse de considérer l’enjeu essentiel de la protection de l’enfance dans une société démocratique.
Le désengagement de l’État, au prétexte de décentralisation et d’économies budgétaires, rend la France incapable de tenir l’engagement qu’elle a pris en 1989, en signant la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE) qui garantit le droit de protection des enfants contre la violence, la maltraitance et toute forme d’abus et d’exploitation.

« Rien ne révèle mieux l’âme d’une société que la façon dont elle traite ses enfants » disait Nelson Mandela en nous rappelant que « nous devons à nos enfants une vie exempte de violence et de peur ».


[1] UNICEF France, Consultation nationale des 6-18 ans, novembre 2024 

[2] FAS, UNICEF, Baromètre des enfants à la rue, août 2024

[3] Syndicat de la Magistrature, La justice protège-t-elle les enfants en danger, mai 2024

[4] CESE, La protection de l’enfance est en danger, avis du 8 octobre 2024

[5] Assemblée nationale, 12 novembre 2024

[6] ONU, Comité des droits de l’enfant, observations finales sur la situation en France, 15 juin 2023

[7] ONU, Communiqué du 19 janvier 2024

[8] ONU, Examen de la France devant le Comité des droits de l’enfant, 10 mai 2023

Éditorial de la lettre de l’Institut de recherches de la FSU du 28 janvier 2025
Paul Devin, président de l’IR.FSU