Front commun
Les illusions, exprimées par quelques-uns, que la crise du Covid, par la seule réalité de son expérience éprouvante, apporterait les transformations sociales auxquelles nous aspirons, n’ont guère duré. La violence avec laquelle le libéralisme a déjà commencé à vouloir tirer profit de la crise aux dépens de la justice sociale doit nous convaincre qu’aucune évolution positive ne viendra hors des luttes.
Mais si nous devons faire le constat que le capitalisme est capable de se renforcer, par essence, des crises qu’il traverse, ce constat ne doit nous conduire ni au renoncement, ni à la désespérance. Preuve en est le travail que mènent depuis cinq mois, une vingtaine de syndicats et associations pour construire ensemble des alternatives à la crise écologique et sociale. L’intention d’un front commun, dont il faut convenir qu’il procède d’une coopération inédite dans des temps où les divisions scindent le mouvement syndical et associatif, se traduit désormais par la proposition de 34 mesures concrètes pour un « plan de sortie de crise ». Il démontre que les alternatives au capitalisme néolibéral sont possibles aux conditions du choix politique de leur mise en œuvre.
Si la volonté de penser le monde de demain n’est évidemment pas chose nouvelle, elle se dessine aujourd’hui avec la perspective de l’urgence absolue de devoir dépasser nos clivages, nos divisions, nos querelles. C’est avec cette perspective que nous devons soumettre au débat commun ces 34 mesures et vouloir en faire l’occasion de penser les transformations qui permettraient de favoriser la transition écologique et la justice sociale.
La responsabilité de l’Institut de recherches de la FSU est d’y coopérer. Il doit contribuer à construire ce front commun en mettant ses analyses, débats et recherches au service de l’information et de la formation des militants. Rien ne sera davantage nécessaire dans les temps à venir que de soutenir les actions, les luttes et les mobilisations par l’analyse critique de nos sociétés et de leurs idéologies.
Le prochain numéro de Regards croisés sera le signe visible de cet engagement de l’Institut : une vingtaine de chercheurs et responsables syndicaux interrogent l’avenir du mouvement social et du syndicalisme et nul doute qu’ils contribuent ainsi à cette immense tâche commune qui est la nôtre : permettre l’intelligibilité et l’appropriation de nos recherches par les militants.
Plus que jamais, le temps est venu de penser ensemble les espérances d’un monde nouveau.
Paul Devin, président de l’Institut de recherches
Editorial de la lettre de l’IR.FSU du 26 mai 2020
Paul Devin, président de l’Institut de recherches