L’EHESS vient d’avoir l’heureuse initiative de republier un ouvrage essentiel pour le combat émancipateur de toutes et de tous : Le sexe du savoir de Michelle Le Dœuff  dont la première édition date de 1998. Avec une grande clarté, une rigueur, un savoir  accompagnés d’un réjouissant  humour caustique, la philosophe nous y entraine, selon ses mots, « dans des fouilles archéologiques pour clarifier l’origine enfouie de réflexes toujours contemporains et dont l’ampleur reste à mesurer : y a t-il un lien entre les blocages cognitifs inculqués à toute femme dans la perception de rapports sociaux qui l’impliquent, les mécanismes subtils ou grossiers mis en œuvre par les institutions intellectuelles pour maintenir en leur sein autant de domination masculine qu’elles peuvent et le mode de constitution des savoirs que l’école diffuse ou ne diffuse pas ? »

Le sommaire, ci-dessous, montre la diversité et la richesse de ces fouilles, du Moyen-Âge  au XXe siècle, mais je voudrais insister ici sur des pages qui ont fortement marqué et inspiré notre réflexion dans le chantier Femmes, Savoirs, Pouvoirs.

Dans notre article, « Femmes, savoirs, pouvoirs : le choc de la pandémie » paru dans Regards Croisés  35 (que l’on peut retrouver sur la page du chantier sur le site de l’IRFSU), nous revenions sur la  muettisation des femmes dans le débat public, au parlement comme dans les medias, pendant le premier confinement et pointions la répartition genrée des rôles à laquelle on a assisté:  « Elles cousent, ils causent » – Le sexe du savoir ». Reprenant les critiques de M. Le Dœuff à propos du neutre (de fait masculin) des savoirs, nous interrogions la question des « savoirs de femmes », savoirs pratiques et d’expériences, qui ne feraient pas le poids face aux savoirs théoriques et abstraits, associés au masculin dans les stéréotypes de genre, seuls valorisés dans la hiérarchie éducative, scientifique, culturelle, politique.

« La notion de neutre ne vaut que si l’on retrouve le mouvement qui la crée : elle est enracinement qui se nie », écrit M. Le Dœuff. C’est à cet enracinement que le chantier s’est intéressé dans un autre texte, paru dans la Lettre de l’Institut n°129 d’octobre 2021, sur les épistémologies situées, que l’on peut également retrouver sur la page du chantier sur le site de l’IRFSU).

Hélène Gispert chantier FSP

Signalons également cette vidéo, « Michèle le Dœuff – De Jeanne d’Arc à Fauvette, l’imaginaire genré que l’école engendra », datée du 2 mars 2021

https://www.youtube.com/watch?v=nLPGdlcUrNM&ab_channel=Philomel

Sommaire du Sexe du savoir

  • DESHERENCES
    • Comment l’intuition vint aux femmes
    • Femme-objet de discours : enquête sur les catégories
    • Valeurs/contre-valeurs
    • Savoirs et pouvoirs
    • De l’anti-intellectualisme
    • Essais sur le péché originel
    • Un sujet connaissant en devenir
    • Cohérences
    • Platon divin ? Eve se sait/Apollon ordonne : deux banquets pour un collage
  • RENAISSANCES
    • L’existence intermittente des médeciennes
    • Une norme cognitive
    • Connaître en rêvant ? Objet contre objectivation Construction d’objet ou constitution de champ ? Dame Trotulla
    • Etre comme on est perçue
    • Jurisconsultes en grève
    • Verum index sui
    • Epiphanie pour une récréation
    • La clôture masculine du savoir
    • Les épiclères
    • Trois foulards
    • Triomphe et catéchisme du geôlier
    • Le petit savoir
    • Le jugement de Christine
  • BONNE ESPERANCE
    • On recommande l’aspirine
    • Une philosophie vexante, mais pour qui ? Sciences, lettres et philosophie
    • Finalités
    • L’alchimie du Verbe
    • Phallomélancolie ou gaie science ? Duplicités
    • Le neutre
    • Violence factuelle/violence idéelle
    • Visions
    • L’expérience libérale
    • Sainte Scolastique
    • Une femme et un homme en philosophie
    • L’admirable essai
    • Egalité, différence ou divergence ? Corporations.